Le second, en pire

« Et un, et deux, et cinq ans de plus » entonnent déjà les marcheurs de l’an 5, depuis les vieux grognards qui se sont fait pincer l’oreille plus qu’à leur tour – le maréchal Ferrand ou le Castaner de rien – jusqu’aux opportunistes de la treizième heure dont les chaussures de randonnée sentent encore le neuf.

« Et un, et deux, et cinq ans de plus » entonnent déjà les marcheurs de l’an 5, depuis les vieux grognards qui se sont fait pincer l’oreille plus qu’à leur tour – le maréchal Ferrand ou le Castaner de rien – jusqu’aux opportunistes de la treizième heure dont les chaussures de randonnée sentent encore le neuf.

L’an 5 de quoi ? De cette révolution 2.0 qui a réussi le tour de force de dynamiter les deux principaux partis de gouvernement, statues de commandeurs inamovibles depuis plusieurs générations, en les réduisant en confettis de moins de 5% des suffrages ! En 1859, le carnage de la bataille de Solférino avait abouti à la création de la Croix-Rouge. Le naufrage socialiste n’était guère moins violent cette fois-ci, mais les derniers irréductibles à la rose au poing ont été poussés dans les cordes, exilés en banlieue à Ivry sur Seine, loin, bien loin de la prestigieuse adresse historique au cœur de Paris.

Pour le Parti Socialiste aussi, il aura fallu tirer une croix rouge sur le siège de Solférino, en 2018

Qu’aurons-nous gagné à la place ? Après Napoléon III, aurons-nous droit (car il faut se rendre à l’évidence, ils sont tous deux tout sauf gauches, même s’ils ont essayé de faire semblant le temps d’un débat) à Emmanuel II en pire libéral ou à Marine 1e en pire autoritaire ?[i]

Cet Empire se soldera-t-il, lui aussi, par la bataille de Sedan (bas, contre ceux d’en haut), et l’instauration d’une nouvelle République, réclamée à corps et à crics par Mélenchon, l’infortuné troisième de la compétition qui rêve ouvertement d’une revanche au parlement, et qui, finalement, projetterait bien son hologramme à la tête du gouvernement ?

L’héritier putatif Emmanuel II n’est pas regardant sur les lignées dont il se réclame, depuis De Gaulle en passant par François et Nicolas. En juin 1853 son lointain ancêtre généralisait le régime de retraite par répartition pour les fonctionnaires (à 60 ans !) et voilà qu’Emmanuel fait de la réforme de cette institution le cheval de bataille de son règne à venir. Le 25 mai 1864, Napoléon III instaurait le droit de grève, dans un contexte de luttes sociales dures qui inspirèrent à Zola son roman « Germinal ». Il ne se doutait pas encore qu’il glisserait ce caillou dans la chaussure d’un marcheur ampoulé qui se retrouverait assiégé par des hordes de gilets jaunes !

A l’époque, Movember, ça avait vraiment de l’allure !

En 1855, Napoléon III, qui s’était opposé à la Russie dans la guerre de Crimée (déjà !), remportait une victoire décisive à la bataille de Ma…lakoff. Emmanuel II ou Marine 1e auront-ils le même engagement et la même réussite, ou mériteront-ils au contraire les Châtiments[ii] d’un Hugo frais, tonnant « Adieu, Monsieur le Professeur » ou « Elle descend de la Montagne »[iii] ?

Espérons que ce second en pire permettra au moins de sauver les meubles. Personnellement, je me passerais volontiers de la mise en vitrine des nouveaux modèles qui avaient caractérisé le style Napoléon III : les poufs, boudeuses et confidents en tous genres. Regardez-les, malgré les couches d’ans caustiques et l’odeur de sire, ils piaffent d’impatience de trouver leur place sous les ors des palais de la République, dans l’ombre de Marine, avides de s’accaparer l’RN du pays.

Trouvons-leur une utilité pour la France en les recyclant : c’est quand déjà les horaires d’ouverture d’Emmaüs ?

Rem-Pile ou Face-iste ?
Vous laisseriez vraiment le hasard décider pour vous ?

Pattes de mouche du Kfard :

[i] Le second Empire est analysé en 2 périodes par les historiens :

  • L’Empire autoritaire (de 1852 à 1860)
  • L’Empire libéral (de 1860 à 1870)

[ii] Les Châtiments (1853) est un recueil de poèmes satiriques de Victor Hugo qui éreinte Napoléon III. Zola écrivait : « Le Napoléon III des Châtiments, c’est un croquemitaine sorti tout botté et tout éperonné de l’imagination de Victor Hugo. Rien n’est moins ressemblant que ce portrait, sorte de statue de bronze et de boue élevée par le poète pour servir de cible à ses traits acérés, disons le mot, à ses crachats »

[iii] Deux des plus grands tubes (si,si – OK boomer) du chanteur Hugues Aufray, taillés sur mesure pour chacun de nos 2 finalistes

Premier tour de ménage

Oyez, oyez, gentes dames et braves gens,
Ou braves dames et gentes gentes,
Comme il vous plaira !
Aujourd’hui, tout est encore permis,
Aujourd’hui, tout est déjà promis !

Oyez, oyez, gentes dames et braves gens,

Ou braves dames et gentes gentes[i],

Comme il vous plaira !

Aujourd’hui, tout est encore permis,

Aujourd’hui, tout est déjà promis !

– o –

Ne ratez pas cette occasion exceptionnelle de voir,

Ce dimanche seulement, dans votre ville,

Pour une représentation unique, de vote utile,

Ou coup de sang ou de folie, inavouable, dans le secret de l’isoloir

Une douzaine de postulantes et d’aspirants Président

« Nous douze », apôtres, singes et « en même temps » salopards.

Sous vos yeux ébahis, ils cacheront la vase sous un gros nénuphar

En faisant miroiter un programme époustouflant, hallucinant !

– o –

Gonflés d’orgueil ils tournent, tournent sur une ritournelle

De bandonéon, caracolant à qui décrochera le pompon.

Ils montent et descendent au rythme des flonflons

Se bourrant le mou pour remporter ce suffrage universel.

Le petit Nicolas ouvre le bal des mots dits, du pont craignant la chute,

Inéluctable, une fois encore… et bien moins spirituelle que celles du Jean bon,

Le clown qui fait mourir de rire la salle – et l’hémicycle – dès qu’il éructe.

Quant à Nath, elle est arrivée trop tard tôt, et Poutou dire, Phil est mauvais qu’au ton.

– o –

Anne, la Maire mise au ban cale, et parvient à peine à la cheville du cadet Roussel.

Jadot raccommode un patchwork de nuances de vert qui se déchire et s’effiloche

– même l’envolée des prix du gaz ne parvient pas à provoquer leur étincelle –

Alors que Jean-Luc s’envole toujours plus haut avec son holo-programme fantoche.

L’édIle de France, reine des Primaires adroite, a beau caresser des ambitions nationales,

Elle fond comme la banquise face au réchauffement clivatique extrême

Sur les braises duquel soufflent à qui pire pire Marine et Eric, ces vandales.

…Et pendant ce temps-là Manu milita, rit…. Et se vit déjà ressusciter après le Carême !

Ne manquez pas cette occasion unique de faire entendre votre voix

En glissant votre bulletin pour votre circassien favori dans l’urne.

Songez à toutes ces époques et pays où vous n’auriez pas d’autre choix

Que de souffrir le joug d’un Monsieur Déloyal ou d’un dresseur de consciences taciturne.

– o –

Ce soir, une fois le rideau retombé, les jongleurs, les acrobates,

Les équilibristes et les clowns seront fixés sur leur sort,

Et nous connaîtrons le nôtre pour la fin du spectacle après l’entracte…

– o –

Avec les finalistes qu’elle mérite, la France s’endort…


Pattes de mouche du Kfard :

[i] Dans le système social romain, des groupes familiaux patrilinéaires portant le même nom, le gentilice.