Vendredi 13 ordinaire ou super ?

Comme chaque matin, les ondes de douleur irradient depuis la 1e lombaire, de manière bien plus fiable que la box wifi. Je suis donc encore bien vivant, les poules n’ont pas encore de dents, Borne continue à pondre des 49.3 à gogo, la Terre continue de tourner inexorablement autour du Soleil qui continue sa course folle au sein de la galaxie, qui…

Je sursaute ! Le radio-réveil égrène la grésillante et monotone litanie des « nouvelles » et des « promotions » du jour, comme si de rien n’était…

Comme chaque matin, les ondes de douleur irradient depuis la 1e lombaire, de manière bien plus fiable que la box wifi. Je suis donc encore bien vivant, les poules n’ont pas encore de dents, Borne continue à pondre des 49.3 à gogo, la Terre continue de tourner inexorablement autour du Soleil qui continue sa course folle au sein de la galaxie, qui…

C’était tellement improbable, selon les experts autorisés – ces prophètes de mauvais augures, devins frelatés et voyantes qui se font tout un film de leur boule de cristal – et pourtant il faut bien se rendre à l’évidence : nous avons encore survécu à la malédiction du vendredi 13, heureux ceux qui croient sans avoir bu, Dieu soit loué[i] ! 

Et pourtant nous avions fait de notre mieux pour leur donner raison, et pour les rassurer sur la légitimité de leur noble profession, dont les annonces de cataclysmes ont été si souvent contrariées depuis l’Antiquité qu’ils finissent par faire Pythié.

La guerre que nous tenions à distance, en la consignant dans une réalité virtuelle, derrière les écrans de nos télés et de nos portables, a ressurgi dans la « vraie vie », sur le continent européen, à moins de 2500 km de nos frontières ! Et incapables d’éteindre l’incendie qui dévore un pays tout entier, nous regardons, impuissants, ce brasier gagner inlassablement en horreur, en désolation, en déshumanisation, affalés dans nos fauteuils à écouter le requiem lancinant des orgues de feu Staline et des ogres de Wagner.

Des nuées incandescentes s’échappent à tous vents de ce foyer ardent, sur lesquelles soufflent des hordes de dictateurs qui, ne se rêvant qu’en gourous, n’hésiteraient pas à mettre la planète sens dessus-dessous, sans se préoccuper d’éventuels effets boomerang : Taïwan, la péninsule coréenne, l’Iran, la frontière entre l’Inde et la Chine, l’Afrique, les alertes rouges clignotent, les sirènes hurlent à la mort et les pompiers de la planète ne savent plus où donner de la tête.

Au-delà du bal macabre des luttes de pouvoir entre puissances et de la montée de ce que nous ne tarderons pas à devoir qualifier de guerres civiles, nous sommes sur le point de réussir l’exploit – inédit celui-ci – d’allumer la mèche qui met le feu à notre planète.

Nous avions été affligés par l’échec de la COP27 à Charm El Sheik ? Aucun doute, celui-ci ne pourrait que provoquer un sursaut – ne serait-ce que d’orgueil – dès la COP28, pour tordre la trajectoire exponentielle du réchauffement climatique, et éviter d’achever en quelques décennies l’œuvre entamée par Attila[ii] il y a 16 siècles.

Pour sauver la planète et l’honneur de l’homo sapiens, nous allions donc logiquement confier notre destin aux sages et aux champions les plus exemplaires de la cause écologique, n’est-ce pas ? Et le gagnant est … le patron de la compagnie pétrolière nationale des Emirats Arabes Unis, qui accueillera somptueusement les délégations de la COP en limousines dans une débauche de luxe, dans d’immenses hôtels climatisés de Dubaï ! C’est tout-à-fait un sultan[iii], assurément, pour les défen-soeurs et frères de l’environnement.

What did we expect[iv] ? N’essayez même plus de toucher du bois pour conjurer le mauvais sort :  cette fois, c’est sûr, l’arbre de la vie va finir en COPeaux, et gare aux échardes !

Et comme un vendredi 13 durant lequel nous cumulons de tels nimbus si menaçants ne suffit pourtant pas à précipiter la fin du monde, on enchaîne sur le « Blue Monday » : le lundi le plus déprimant de l’année !

Pour vous donner une idée du tableau : là où nos cousins américains ont eu droit il n’y a pas plus d’un mois à une mémorable « bombe cyclonique » (vous avouerez que ça en jette !) avec des températures record de près de -50 degrés, notre tempête hivernale « historique » à nous s’appelle… Gérard ! Digne d’une blague de café du commerce (« Gérard… ment vu ça, pfffff ! »), on n’est pas loin de toucher le fond du verre !  

Et pourtant… elle tourne, toujours et encore, notre bonne vieille Terre ! Elle a le chic pour absorber tous les chocs, au fil des échecs de chaque bad COP[v].

Alors on continue comme si de rien n’était ?

On pourra toujours tenter de dire : « qui aurait pu prévoir que ça finirait si mal ?»… jusqu’à ce qu’il ne reste plus personne pour l’entendre… ni pour le dire !


[i] Offre réservée aux abonnés, voir conditions générales dans le contrat de service [Bible, Nouveau Testament, Evangile selon St Estèphe 20, 24-29]

[ii] Attila, le Roi des Huns, dont la sauvagerie était telle que la légende disait que « là où [il] passait, l’herbe ne repoussait pas », telle que Grégoire de Tours l’a consignée plus de 150 ans après son invasion de la Gaule.

[iii] Sultan Al Jaber, qui cumule les fonctions de PDG de la Abu Dhabi National Oil Corp, compagnie pétrolière nationale de l’Emirat d’Abu Dhabi, et de ministre de l’Industrie et de la Technologie Avancée des Emirats Arabes Unis. Pouvait-on rêver champion plus exemplaire du développement durable ?

[iv] « A quoi nous attendions-nous ? » [en confiant l’organisation de la COP28 aux Emirats Arabes Unis], en référence au slogan ironique « what did you expect ? » de la célèbre campagne publicitaire pour Schweppes.

[v] L’expression “bad cop” signifie littéralement “mauvais flic », et s’oppose au « good cop » (« bon flic ») dans l’équivalent de l’expression française « les gentils et les méchants ».

Charles attend…

Charles attend, impatiemment, le tea time, pour siroter sa tasse de thé à l’amante

Il rêvait de fissurer les piliers du pont de l’Alma Mater[1], d’effacer l’affront de ces femmes illustres – Elisabeth, Diana, Margaret – qui, autour de lui faisaient la Grande Histoire pendant que lui, s’illustrait à en besogner une seule, si terne, mais qui suffisait à remplir son lit et son cœur.

Charles attend, impatiemment, le tea time, pour siroter sa tasse de thé à l’amante

Il lui tardait de brandir haut les couleurs et le sceptre de ses ancêtres, quand dans le salon pourpre, lovée sur un divan, sa bourgeoise se calait, priant pour que son gode save ce King avant de rentrer dans l’arène.

Ses rêves d’Empire, décence mise à part, de grandiloquant souffle réformateur et créateur, se fracassent sur le conservatisme prude et le rigorisme empesé du protocole auxquels adhèrent Mère et Père sévères.

Charles attend, impatiemment, le wait & see[2] time, pour siroter sa tasse de thé à l’amante

Amer, le prince de Galles voit ses illusions s’enliser dans des Unes nauséabondes de feuilles de choux qui vantent son expertise et sa vision du digital… mais c’est hélas de tampon qu’il s’agit, dans cette conversation privée avec « sa » Camilla, surprise par un amateur de CB… «Tampax edus rerum »[3]

Charles attend, impatiemment, le T time, pour siroter sa tasse de Camilla manie

Qui pouvait se douter, en les voyant se pavaner dans leurs costumes de lumière à Buckingham pour tant de Noëls au balcon, que pacotilles sont, ces marionnettes posthumes qui complotent et chinoisent dans l’ombre.

Sonnante, voire tintinabullante dans le domaine patrimonial, cette dynastie s’est révélée trébuchante sur les plans matrimoniaux, « like a candle in the wind »[4], coquins de Windsor !

Rien ne sert de courir… Ses détracteurs pensaient que Charles traînait, avec sa complainte incessante sur sa mère qu’on voit tancer… ? Son attente a fini par payer. En 2005 le Duc de Cornouailles noua épousailles avec sa princesse consort, et ayant enfin trouvé chaussure à son pied avec cette Anastasie – après son essai infructueux avec Cendrillon – put enfiler l’archiduchesse en chaussettes sans avoir à se dissimuler.

Charles attend, impatiemment, le T time, pour siroter sa tasse de Camilla déjà mamie

Victime unique et désespérément seule depuis 70 ans de cette maladie rare que fut la fébrile et stérile attente dans l’antichambre de la couronne britannique, il ne savait plus quoi inventer (le Brexit ? l’école ?) face à l’impatience devenue intenable pour son entourage : « pour être sacré, Charles, magne ! ».

Philip éteignit sa 100e bougie dans son dernier soupir, et Elisabeth ne lui survécut que quelques mois au-delà de son Jubilé de platine.  Et vient sa jubilation à lui, son T time : le Trône, enfin !

Youhou !

   Faites dépoussiérer leurs bonnets à poils, et amidonner la garde pour la relever !

       Rafistolez les confettis du Commonwealth, voire du Royaume jadis Uni qui s’étiole inexorablement !

               Sortez de l’anti-mythe les trois plumes d’autruche des armoir(i)es du Prince de Galles pour les pom-pom girls !

Charles s’attend à quoi, sinon à un Enfer, maintenant qu’il est enfin assis sur son Trône ? Il est maintenant un peu trop tard, n’est-il pas, pour le tea time, au crépuscule de sa Camilla, momie maintenant ?

Décidément,

Tempus edax rerum[5]

indeed !


Pattes de mouche du Kfard :

[1] Alma Mater est une expression d’origine latine, qui peut être traduite par « mère nourricière », parfois utilisée pour désigner le collège ou l’université où une personne a étudié.

[2] Expression anglaise signifiant « attendez et voyez », pour encourager une personne à être patiente.

[3] Jeu de mots sur l’expression latine « tempus edax rerum, (tacitisque senescimus annis) » – le temps détruit tout, (en silence les années nous mènent à la vieillesse) [Ovide, métam., XV, v.234]

[4] Comme le fredonnait Sir Sourire, Elton John, dans une chanson écrite en l’honneur de…. Et non, Marylin Monroe, en 1973 – mais avantageusement relancée en mémoire de la solaire Diana, prématurément éclipsée en 1997.

[5] Expression latine : « tempus edax rerum, (tacitisque senescimus annis) » – le temps détruit tout, (en silence les années nous mènent à la vieillesse) [Ovide, métam., XV, v.234]