Au commencement, il y eut…
une même Terre, donnée en partage à une multitude de créatures, d’êtres, d’âmes, de rêves
et une seule humanité débordante de diversité créative,
qu’une multitude de Dieux capricieux exhortèrent unanimement à croître et se multiplier
Il y eut un soir, il y eut un matin…
Et à peine Adam et Eve eurent-ils fait l’expérience de la vie de couple…
Se partageant une côte au cours d’une soirée manifestement bien arrosée (seule explication pour qu’Adam puisse survivre à la douleur d’une telle ablation, à cette époque où les anesthésistes étaient – déjà – en sous-effectif criant).
Tout à leur bonheur familial tout neuf, ils ne se voyaient qu’à un et ne soupçonnaient pas derrière l’Abel déjà rôder la Bête…
Eve et Adam pensaient pouvoir attendre tranquillement une retraite bien méritée, contemplant depuis leur petit pavillon propret leur progéniture jouer paisiblement à Chi-Fou (en attendant patiemment l’invention des ciseaux d’ici quelques centaines de milliers d’années) sur la pelouse immaculée du jardin d’Eden.
Ils pensaient avoir fait le Job[1], et déjà laissé prestement l’Ancien Testament derrière eux… (air romantique de violon et de harpe)
Quand soudain… (coup de grosse caisse et dissonances de cuivres, l’accordéon n’ayant pas trouvé grâce aux oreilles du Créateur, tu m’étonnes !)
…éclata la première querelle du ménage !
L’histoire n’en a même pas retenu la ou les causes
Etait-ce un regard déplacé ? Un mot de travers prononcé ou entendu ? Un geste offensant esquissé ou deviné ?
Nul ne le sait, et peu importe d’ailleurs…
…mais l’effet papillon venait d’enclencher sa mécanique inéluctable !
Nos pauvres ancêtres communs furent happés dans l’engrenage infernal qui les amènera, en moins de temps qu’il n’en faut pour dire « ouf », à se balancer d’abord les pires horreurs, épuisant rapidement les noms d’oiseaux disponibles à ce stade primaire de la création.
Puis tout ce qu’ils pourront trouver sous la main. Une pomme pour commencer, un serpent qui aurait mieux fait de rejoindre son trou aussitôt sa réplique déclamée, puis la clé du paradis, et enfin les pots de fleurs – qui l’instant d’avant décoraient si joliment les allées verdoyantes du jardin d’Eden – réduits à l’état éphémère de projectiles aux trajectoires improbables, promptement pulvérisés, avec une efficacité et une précision toutefois très décevantes.
Mais tout ça ne suffit guère à éteindre le feu propagé par le big bang nucléaire de la rage qui dévore tout sur son passage, ni à étancher le déluge de ressentiment et de haine qui engloutit le peu d’humanité et de bienveillance qui auraient survécu au brasier.
…Et Caïn, n’ayant aucune chance de trouver un thérapeute pour l’aider à surmonter ses traumatismes de premier né de l’histoire de l’humanité, propagea la mèche incendiaire à la génération suivante en commettant le premier fratricide.

Les progrès techniques alimentèrent rapidement une escalade rendant justice au génie humain dans les jouets permettant de professionnaliser les conflits, et les étendre à des dimensions toujours plus spectaculaires : armes blanches, instruments et techniques de torture extrêmement pervers, projectiles de plus en plus sophistiqués, explosifs en tous genres, engins roulants, chenillés, flottants, sous-marins, spatiaux, furtifs, miniaturisés, autonomes… mais toujours aussi létaux.
S’il y a un domaine dans lequel nous avons, humains de la planète Terre, réussi à matérialiser un progrès exponentiel, c’est bien dans celui de nos capacités d’autodestruction : 5% de l’arsenal d’armes nucléaires accumulé sur la planète suffirait pour la rendre totalement inhabitable. Donc avec ce seul arsenal nucléaire, nous avons de quoi nous auto-détruire 20 fois ! Et c’est sans compter les montagnes de missiles, bombes, mines, armes à sous-munitions et autres basiques obus, simples grenades, trucs à balles ou même vagues lames qui trouent et oblitèrent les vies par centaines de milliers en Ukraine, en Israël, à Gaza et dans tant d’autres pays du monde à feu et à sang pendant que vous lisez ces lignes.
Et voilà qui répond à la question qui commençait à monter dans vos pensées de façon de plus en plus insistante : où tout cela va-t-il nous mener ?
Nous y voilà, dévalant la pente glissante qui nous mène inéluctablement vers la terrible et ultra-sensible actualité : le conflit israélo-palestinien !
Nous voilà sommés de prendre parti,
de donner Torah l’un, ou de déclarer l’autre complètement à l’Hamas,
et en Coran étant soupçonné de privilégier l’horreur subie par les uns à la souffrance des autres
Coincés entre les racines et les ramifications qui s’entre-déchirent,
d’un monothéisme pourtant partagé
Comme Eve et Adam, nous nous découvrons nus comme des vers, spectateurs impuissants de cette n-ième réplique des querelles humaines. Querelles entre les générations les plus modernes et les plus abouties de leurs descendants, auxquelles elles ne semblent guerre pouvoir échapper.

Otages, oh désespoir ! Nous ne pouvons que pleurer pour tous nos frères et sœurs pris dans la tourmente de part et d’autre de cette plaie ouverte de l’humanité, victimes innocentes de la folie meurtrière qui s’empare de leurs familles respectives.
Comment interrompre le décompte morbide indécent qui se déroule sous nos yeux, en direct et en continu sur les chaînes d’information ?
Que pouvons-nous faire pour sortir de leur tourbillon hystérique les illuminés et les illusionistes de la loi du Talion, les libérer du syndrome du colon irritable ou du mal à Akbar qui les tenaille ?
Combien de torrents de larmes, combien de fleuves de sang devront encore couler avant que les « faut qu’on » de chaque camp soient renvoyés derrière leurs murs, leurs barbelés et dans leurs tunnels aussi froids, rigides, étroits et stériles que leur vision du monde, qui les rapproche paradoxalement tant l’un de l’autre ?
Trève humanitaire, évidemment, mais surtout trêve de coloneries, c’est urgent !
Sortons le débat de son état-nyaou de mort cérébrale,
arrêtons le train fou lancé à toute vapeur vers le précipice des impasses de l’histoire,

redressons la table renversée, remettons le dialogue au cœur.
Pour renvoyer enfin la Bête immonde dans un passé révolu, et rendre l’Abel au monde et à sa famille,
donnons sa chance à un monde ouvert aux deux voisins, aux deux cousins, chacun dans son Etat, en gageant qu’une frontière légitime évite de se fracasser contre un nouveau mur des lamentations.
Pattes de mouche du Kfard :
[1] Le Livre de Job est l’un des livres du Tanakh de la Torah et de l’Ancien Testament de la Bible, qui porte sur le problème du Mal
[2] Je laisse le journaliste Pierre Ballouhey en parler (très bien) dans l’article ci-dessous rédigé pour la FECO France :
« La dessinatrice égyptienne Doaa Eladl est accusée d’avoir insulté Adam en le dessinant, Adam est considéré comme un prophète par les Salafistes. Elle ne l’a même pas dessiné à poil comme on le fait depuis des siècles. C’est le nouveau secrétaire général du Centre National pour la défense des libertés Maître Khaled El-Masry, qui a porté plainte contre Doaa Eladl ainsi que contre le directeur du journal indépendant Al-Masry Al-Youm, M. Naguib Sawiris, pour la publication de ce dessin. Sur le dessin incriminé, un ange apparaît, il ressemble à un Égyptien typique avec des ailes dans le dos, près de l’arbre aux fruits défendus, il dit à Adam et Eve :
– Si vous aviez voté “oui” au référendum, vous n’auriez pas été chassés du Paradis terrestre. La vie est une question de chance !
Tu parles d’un délit !
Nous sommes scandalisés comme la plupart de nos confrères dans le Monde. Doaa Eladl est une dessinatrice de grand talent, elle est une des plumes les plus appréciées dans son pays et dans le monde. De plus, elle est très fière du printemps qui illumine son pays, les révolutions prennent souvent des virages étranges.
La section française de la Feco témoigne toute sa solidarité à Doaa Eladl et à son journal, et espère que cette affaire absurde prendra fin le plus tôt possible vers une issue heureuse. »
Après la lecture de IS RAELITY
Ah ! Je comprends enfin l’origine de l’origine de l’origine… de ma naissance !
Merci cher Kfard Dechaîné pour la générosité de ton humour en partage. Par delà le sang et les larmes, encore et toujours, de notre monde aux perspectives sans cesse plus infernales Même la Pureté de la neige boréale se rétrécit !
Me revient en mémoire l’image de mon Père – ardemment croyant – soudain fou furieux en découvrant dans le tas de fumier devant l’étable un serpent, vivement enfourché. Je comprends maintenant !
Oui, le conflit israélo-palestinien est une quintessence, parmi tant d’autres hélas, de cette définition : » L’Homme est un loup pour l’Homme »
Quel que soit ton accablement de Terrien, cher K f D, n’oublie pas que le Père-Noël garde sa générosité céleste : rédige avec toute ton attention ta lettre, n’oublie aucune demande, légitime puisque ressentie ! Fais-en prendre connaissance à toutes tes relations
Bises du coeur, encore humain je crois ! de ton Beau-Père ( Beau ? C’est pas le miroir qui parle ! )
Gilles
P S Dès notre prochaine rencontre, tu voudras bien m’apprendre à jouer à Chi-Fou ?
Pourrais-tu Intervenir, s’il te plait, auprès de Pierre Ballouhey pour qu’il transmette ma solidarité à Doaa Eladl…
Il faudrait apprendre l’égyptien pour s’abonner à Al-Masry Al-Youm…