Le gazouillis des réseaux zoziaux…

Une hirondelle n’annonce peut-être pas le printemps, mais elle ne se contente pas de gazouiller : à elle seule, elle maîtrise toutes les nuances pour ramager, triduler, trisser ou truisotter en polyglotte. La chouette et le cygne peuvent se partager des lamentations sans avoir à interposer un mur entre eux. Même une bécasse peut crouler et une cigogne craquer sans que rien ne s’écroule, un canard se faire rabattre le caquet sans pour autant prendre la mouche !

« Cui cui, tweet, tweet… »

Tendez l’oreille !

Mais si, vous pouvez entendre ! Mettez-y un peu du vôtre, diantre !

Vous avez le nez collé sur votre écran, mais vos oreilles, elles, même si elles ne sont pas décollées, restent disponibles… pour peu que vous n’y ayez pas vissé bien serré une paire d’Ipods, histoire de fermer définitivement les écoutilles de votre bulle digitale, ce technococon qui porte si bien son nom !

Vous les entendez bien comme moi, ces trilles stridentes ? 

Elles nous vrillent les tympans depuis l’autre côté de la Méditerranée, depuis cette Terre qui fût Sainte avant d’être ceinte. Mais pourquoi s’égosillent-ils ainsi, ces Palestiniens, à hurler à la mort ?

Séquence nostalgie : un des premiers dessins du Kfard…extrait de « la Colombe et le Rameau », sur l’air de la Corrida du grand Francis

Ils ne pourraient pas tout simplement prendre leur envol, accompagner les cigognes dans leur migration et venir se joindre aux volées de perruches qui piaillent tout près de nous,

depuis le rebord de nos multiples fenêtres sensément ouvertes sur le monde, superposées en mille-feuilles sur nos écrans dont elles débordent,

ou perchés en grappes grouillantes sur le fil continu des informations qui déroulent leur litanie du pire et du encore plus pire ?

A l’affût d’un doux gazouillis, resterons-nous insensibles aux terribles cris de souffrance des Gazaouis, cloués au sol sous le cliquetis des chenilles, le fracas des bombes et la menace des faucons ?

Continuerons-nous à faire les autruches, la tête enfouie et les ouïes ensablées ? Faudra-t-il attendre la mélopée des lamentations des cygnes du destin, des croassements lugubres des corbeaux ou le requiem des hululements des hiboux de la nuit des temps ?

Nous restons là, avachis comme des oies gavées de ces métavers qui s’évertuent à se tortiller entre deux prises de bec sur les chênes d’information. Et de modernes Nérons cendrés autant qu’incendiaires, dressés sur leurs échasses censées les propulser vers les étoiles, au milieu des décombres encore fumants du nid jadis accueillant, viennent nous déposer cette piteuse pitance directement dans nos gosiers Gafamés.

« Et de modernes Nérons cendrés autant qu’incendiaires… » : retrouvez-les dans cet article de novembre 2021 (déjà !)

Nous laisserons-nous intimider comme des poules mouillées, nous contentant de babiller comme des moineaux, jacasser comme des pies ou gémir telles des tourterelles ? L’observerons-nous, moqueurs ou indifférents, ce peuple Gazaoui, se faire mépriser et massacrer, comme l’Albatros de la poésie de Baudelaire, ce vaste et majestueux oiseau des mers qui claudique sur le pont du bateau sur lequel il se retrouve piégé en piètre situation… et compagnie.

Puisque de moqueur il est question, écoutons – et relayons – plutôt l’appel du geai moqueur des Hunger Games. Ce chant d’espoir, d’une étincelle vacillante dans un murmure isolé, s’est répandu en incendie dans les foules en colère des districts – opprimées par l’édit strict – et est devenu une déflagration assourdissante contre la tyrannie des autocrates de Panem[i] :

Are you, are you[ii]
Coming to the tree?
Wear a necklace of hope,
Side by side with me.
Strange things did happen here
No stranger would it be
If we met at midnight
Under the hanging tree.

« Geai fin ! », le cri de famine des bien nommés Hunger Games

Les oiseaux n’ont pas besoin d’Intelligence Artificielle ou de réseaux zoziaux pour parler plusieurs langues et comprendre celle des autres. 

Certes, le coucou est capable de tuer dans l’œuf la couvée de congénères pour les remplacer par ses propres rejetons, qu’il laissera couver à son insu par l’infortuné pigeon de cette arnaque.

Une hirondelle n’annonce peut-être pas le printemps, mais elle ne se contente pas de gazouiller : à elle seule, elle maîtrise toutes les nuances pour ramager, triduler, trisser ou truisotter en polyglotte. La chouette et le cygne peuvent se partager des lamentations sans avoir à interposer un mur entre eux. Même une bécasse peut crouler et une cigogne craquer sans que rien ne s’écroule, un canard se faire rabattre le caquet sans pour autant prendre la mouche !

Leurs chants multiples et variés, ces babilleries, caquètements, jactances, piaillements, criailleries, pépiements, stridulations, turlutements, jaseries, dodeldirements, jabotages, cancans et autres zinzibulements s’associent, et contre toute attente, se combinent en une symphonie harmonieuse qui nous annonce le retour des beaux jours avant même d’avoir ouvert un volet !

Quand renverrons-nous enfin les « faut cogner » de chaque bord au fond de leur étroit « entre-soi » réduit à pas grand-chose, et unirons-nous nos plumes pour laisser le chant libre aux Colombes ?


[i] Une référence à la citation « Panem et Circences », « du pain et des jeux du cirque », employée par le poète romain Juvenal dans ses « Satires », pour fustiger l’apathie des citoyens romains face aux intrigues et aux manœuvres de leurs dirigeants. Déjà, l’abandon à un cocon douillet du temps des tablettes de cire ?

[ii] Vas-tu, vas-tu

Venir à l’arbre ?

Porte un collier d’espoir,

Côte à côte avec moi

D’étranges choses sont arrivées ici

Aucun étranger n’y serait

Si nous nous rencontrions à minuit

Sous l’arbre au pendu

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Kfard Dchaîné
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6Krmagnole
6Krmagnole
7 mois il y a

« Cui cui, tweet, tweet…. » Enfin le printemps revenu a ranimé l’envol de ta lumière créative, cher Kfard…
Bien sûr tu ne pouvais reprendre l’évocation du monde sans évoquer, plus que les charmes naturels de la saison nouvelle, les horreurs de l’hiver politique sans fin, en particulier en Ukraine, au Proche Orient, en Mer du Nord… Ton dessin d’introduction me fait frissonner, moi qui ne peut même pas prononcer le mot « guerre » ( Je redoute les infos à la télé, leurs bestialités sanglantes à tête d’Homme ).. Oui le « Grand Francis  » pourrait sans doute exprimer très fort le drame des Ukrainiens, des Gafamés…

Un M E R C I ébahi pour tes références culturelles multiples – de plus de deux millénaires parfois – qui secouent subitement mes neurones languissants…
MERCI pour ton humour, souvent encore plus rouge sang que noir !
MERCI pour le trait de tes caricatures – l’humour leur ajoute souvent de la cruauté, cruauté de la réalité…

Oui, le patriarche Cyrille couronnerait bien Poutine sans doute, comme le pape ( Pissette ) Pie VII à Paris couronnait Napoléon

Je n’ai pas encore trouvé le temps de te lire entièrement : j’en suis tristement frustré…

PS Oui, je crains que le tapis rouge du communisme soit pour longtemps celui du sang ( comme le sang de la Liberté à Guernica ).

P S On pourrait croire, cher Kfard, que tu travailles en particulier pour moi ! Moi curieux de poésie, d’Histoire, de géographie, de philosophie… Encore 4 fois

M E R C I

6Krmagnole
6Krmagnole
Répondre à  6Krmagnole
7 mois il y a

Suite à ma réflexion de la semaine dernière
sur le « gazouillis des réseaux zoziaux  » :

Le gris s’épanouit sur Flouquet. Et la pluie promise par la météo se rapproche : les limaces n’en finissent pas de limacer d’espoir.
Mais le moral ne se laisse pas aller aux ombres environnantes que rejoignent, me semble – t-il, celles, bien plus puissamment lugubres, de la Poutinie, car j’ai ouvert, enfin, la fin de ton message :
MERCI pour cet humour intarissable, heureusement !
Qui allègerait même les tortures dantesques

6Krmagnole
qui croyait percevoir à l’instant la voix des créateurs du nid chassés par le geai revenu, sous le Pech. Mais non ! C’était l’écho de Navalny dans sa boite, ou celui de laTerre Ceinte…

Je vais t’attendre au café de Flouquet pour détourner un peu, du monde, l’attention.

PS. Ah, la Crimée porte hélas de plus en plus un nom qui exprime l’Histoire…
PS2. Dès qu’on se reverra je te demanderai la grâce du partage des chants d’oiseau : tu babilleras, caquèteras, jactancera, piaillementeras, criaillerias, pépieras, stridulationeras, turlutementeras, jaserieras, dodeldirementeras, jaboteras, cancaneras, zinzibulementeras ( tu as des choses à dire, toi).. Et je retournerai à mes origines voleteuses – dont je perçois parfois quelques échos conservés ( oui, je crois que j’avais des ailes dans le Jardin d’Eden ).
Bon, je vais arrêter avant de me faire rabattre le caquetbabillard

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